RENDEZ-VOUS N°4 : REGARDS SUR L’UKRAINE

Le Tour de France Piloter Sa Ferme reprend du service ! En 2019, nous sillonnions les routes de France pour partir à la rencontre de nos agriculteurs. Avec le contexte actuel, cet événement dédié à nos abonnés revient en 2020 en format 100% digital : 7 visioconférences autour de 7 thèmes d’actualité. Notre objectif ? Apporter aux agriculteurs les informations et les conseils dont ils ont besoin. Du 26 mai au 17 juin, nous vous donnons rendez-vous sur le blog Piloter Sa Ferme pour vous partager l’essentiel des informations échangées lors de ces visioconférences.

Pour ce quatrième rendez-vous du Tour de France Piloter Sa Ferme, nos équipes se sont associées à Jean Paul KIHM, agriculteur français et dirigeant d’Agrokmr (Ukraine).

Regards sur l’Ukraine : que faut-il en retenir pour « mieux » gérer nos fermes en France ?

Aujourd’hui en France, les débouchées de vente pour les producteurs de grandes cultures sont variées mais une grande partie des ressources sont dédiées au grand export, où les agriculteurs sont en concurrence avec les autres producteurs mondiaux.

Ces exportations mettent en lumière la notion de compétitivité des entreprises dans le cadre de la concurrence avec les entreprises étrangères. Afin de comprendre comment « mieux » gérer nos fermes en France, Jean-Paul Kihm, dirigeant d’Agrokmr en Ukraine et agriculteur Français, nous livre son témoignage.

En tant qu’agriculteur Français exploitant depuis 1997 et originaire de la Haute Marne, Jean Paul Kihm souhaitait gagner en compétitivité et en temps libre. C’est pourquoi il s’est associé en 2003 à quatre autres agriculteurs pour travailler à plus grand échelle et réduire les coûts de mécanisation.

Ce nouveau temps libre a permis à Jean Paul et ses associés de voyager à travers l’Europe et découvrir des modèles différents de ceux qu’ils connaissaient en France et de se remettre en question.

La genèse du projet Agrokmr.

C’est au début des années 2000 qu’ils partent visiter l’Ukraine suite à l’invitation faite par une coopérative : de Kiev à Odessa, ils découvrent un pays en période post Union Soviétique, où ils font face à l’obsolescence des exploitations et très peu de champs de production. Mais suite aux échanges sur place, ils détectent le potentiel important du pays qui ne demande qu’à être développé.

Pendant trois ans, ils retournent à plusieurs reprises en Ukraine et finissent par rencontrer un constructeur de machines agricoles, prêt à les aider dans la mise en place de leur projet et de leur business plan.

C’est 3 000 kilomètres à l’est, dans la région de Dnipropetrovsk, région russophone et première productrice de blé en Ukraine, qu’ils décident de poser leurs valises et de reprendre une exploitation de 2 200 hectares, après avoir obtenu l’accord de leur banque.

Leur première récolte en 2007 est catastrophique, du fait d’une sécheresse importante et d’erreurs techniques. Une réflexion autour du projet s’impose alors afin de ne pas réitérer les mêmes erreurs. Par la suite, des changements ont été opérés : des agrandissements faits petit à petit afin d’appréhender l’environnement aux alentours, de l’embauche de personnel puis des reprises d’exploitations ente 2012 et 2020.

Les clés du succès d’Agrokmr.

Plusieurs facteurs expliquent le succès d’Agrokmr dans le temps. Tout commence par une importante gestion du foncier sur place, en s’adaptant aux coutumes locales, et des ressources humaines. Au début de l’aventure, Agrokmr comptait quatre salariés. Ils sont aujourd’hui soixante-dix à participer à l’aventure. Les ressources humaines sont la clé de voûte du succès de l’entreprise : des collaborateurs compétents, motivés et polyvalents.

La mécanisation fut aussi un point essentiel de la réussite des quatre associés afin de réduire les charges.  Les nouvelles technologies, indispensables dans la gestion des grandes surfaces, leur ont permis d’avoir des véhicules sous contrôle, des cultures sous surveillance et de développer leurs activités.

L’exploitation est principalement centrée autour de la production de tournesol,  blé d’hiver et colza qui est ensuite utilisée à l’export vers les pays de l’Orient (Inde, Bangladesh, etc.), l’Europe mais aussi pour les marchés locaux (trituration, alimentation animale, etc.)

Comment envisagent-ils la suite ?

Leur objectif principal aujourd’hui est de stabiliser la surface de production autour de 18 000 à 20 000 hectares et de pérenniser l’entreprise par l’entrée au capital des cadres. Dans l’optique de toujours se remettre en question, leur ambition est de rechercher de la valeur ajoutée autour de thèmes spécifiques, comme les pôles logistiques, les flottes de véhicules mais aussi la diversification.

Que faut-il en retenir pour mieux gérer nos fermes en France ?

Si l’on compare la France à l’Ukraine, quelles sont les différences ? Lorsque l’on analyse les chiffres concernant les charges structurelles et opérationnelles, l’avantage est à l’Ukraine où les coûts sont beaucoup moins importants notamment pour ce qui est des frais généraux, du foncier ou encore de l’achat de semences et engrais.

La tendance s’inverse lorsqu’il s’agit du chiffre d’affaires. Les rendements ainsi que les prix de vente sont généralement plus avantageux en France qu’en Ukraine. Mais le plus important reste le résultat final, à savoir le chiffre d’affaires déduit des charges. Et c’est l’Ukraine qui l’emporte.

En tant qu’agriculteur, il est important de se rappeler que l’on n’est pas maître de son chiffre d’affaires et que le coût de production n’est pas lié au potentiel. Tout dépend de nos décisions ! Les facteurs clés de succès des entreprises résistantes d’aujourd’hui sont la capacité de l’exploitation à résister à un choc et le niveau de rentabilité par rapport à la trésorerie. Pour agir, il faut donc comprendre comment se fait le revenu et intégrer le passage d’un monde stable à instable.

C’est pourquoi Piloter Sa Ferme accompagne les agriculteurs en leur proposant un diagnostic de durabilité qui les renseigne sur leur indice de compétitivité et les aide dans leur stratégie de commercialisation pour accéder à une rentabilité durable.

Retrouvez-nous prochainement pour notre cinquième rendez-vous du Tour de France Piloter Sa Ferme autour du thème « Prévision de rendement et modèles agro-météo», une visioconférence animée par Piloter Sa Ferme avec la participation de Luc Lorin, agriculteur et fondateur de Visiocrop.